Le Saint Empire Germanique

By Lion

Depuis le début du XIXème siècle on le pensait disparu.

Après la Seconde, on croyait – à tort – la toute puissance allemande anéantie.

Billevesées.

Soixante ans et des bananes au gras plus tard, le pékin lambda découvre au détour d’une plage perdue au milieu de l’Atlantique que le germain – bien plus que le chinois – est sournois.

C’est par le biais de l’argent que les conquêtes se font et que l’influence culturelle associée fait des ravages, comme dans les plus belles parties de Civilization (de Sid Meier, preuve évidente du complot global teutonique).

Quelle surprise alors de découvrir que la seconde langue de l’Espagne n’est pas le catalan ou le castillan mais l’allemand, que la würst suintante est devenue un élément indissociable du petit déjeuner et que les mousses – E440 et autres colorants chimiques certified © -, aux couleurs improbables et néanmoins artificielles, un dessert local.

Et que dire des magasins, point d’échoppe de vente de tortilla ou de chorizo, ici on célèbre désormais le culte de l’esthétisme germano-russe qui ferait se retourner dans leurs tombes en béton armé les fondateurs du Bauhaus ou les faire passer pour des auteurs de blogs-BD :

Entre short bariolés qui font pâle figure à côté des strings en steak de Lady Gaga et qui feraient passer les chemises hawaïennes magnumesques pour des smokings; et bijoux swarovskien à la finesse d’un Panzer IV version diamants qui ornent les larges cous / doigts et autres extrémités démesurées de la gente féminine, leur donnant enfin un signe distinctif d’entre leurs homologues masculins.

Ainsi « gras dessus gras dessous © P.D » tout n’est que déballage cellulitaire (sans fil façon 3Gros) signe évident du déclin de l’Occident  qui se ramollit en s’empiffrant de conservateurs à la viande et autres molécules transgéniques aux légumes.

Le Creutzfeldt-Jakob et le cancer de la prostate guettant sagement leur heure, là aussi l’Allemand prend de l’avance.

Mais je ne puis blâmer un peuple qui passe la moitié des vingt-cinq premières années de son existence à faire  du sport pour développer des muscles qui me sont inconnus – le tout aidé par quinze années de sélection génétique aryenne poussée – les transformant en montagne digne des meilleurs spécimens de catch, et ce quelque soit leur sexe.

« Qui dit rouge dit sang » comme dirait le gars Rémi, et qui dit stature de stentor dit besoins caloriques hors du commun. Il est donc normal de compenser le déficit énergétique engendré par ces séances quotidiennes de tortures par l’ingestion régulière d’une quantité industrielle de charcuterie et de céréales fermentées, car comme dans le cochon, dans le houblon tout est bon.

Une fois rentré dans la vie active, les seize heures réglementaires de sport n’étant plus compatibles avec les dix-huit heures de travail quotidien, et le régime alimentaire demeurant le même, le teuton tétant toujours autant, enfle et tâtonne en gros triton et trente tonnes.

Je ne lui jetterai donc pas la pierre Pierre et encore moins le gravier; en revanche je resterai vague sur le rocher comme on dit chez les surfeurs monégasques.

Mais je digresse « graisse » et j’en omets les autres joies de la suprématie germanique en pays ibérique, car oui contre toute attente, elles sont aussi réelles que le talent de Christophe Maé.

Quelle ne fut pas ma surprise d’entendre dans les tavernes locales non pas un attendu « Un, Dos, Tres, Maria ! » martinesque, un « Waka Waka ! » shakirien voire dans mes expectations les plus pessimistes une « Macarena » losdelriote; mais une mélopée bavaroise mi-traditionnelle mi-gouda mi-molette.

Un petit coin d’alpages et de Forêt Noire perdu sur le sable, telle une Valda saveur pins des Landes dans votre cacao matinal.

Joie.

Vous me sentez narquois alors que je n’ai plus que trois flèches et vous auriez raison mais le Saint Empire Germanique sait se faire aimer. Vraiment.

Tout d’abord par une réelle politesse toute rigide presque balai-fondementale qui contraste avec l’impolitesse crasse de la génération SMS; mais aussi par un respect quasi quartzien des horaires. Ainsi à « dix-neuf heures zéro zéro » comme aime à dire les Marines gradés, les plages / piscines / bac-à-douche se vident avec une stupéfiante efficacité faisant place aux dix minutes réglementaires nécessaires à l’apprêtement du soir à base de pantalon à pinces blanc / marron / beige / à linge peinant à cacher un abdomen poussif devenu autonome; mais également des robes à fleurs option Saint-Maclou ou à brillants digne de la fine fleur des collections hiver Tati.

C’est l’heure du dîner et du gras double salvateur après tous les efforts de la journée consistant à lever toutes les cinq minutes son coude de 90° pour ingérer assis sur son transat des litres de houblon fermenté avec amour par des compatriotes au pays. Aaaaach !

22h30. Il est l’heure de la 33ème bière de la journée, parfois troquée par les plus téméraires teutons avec un cocktail à base de Jägermeister, alcool national dont je n’ose vous décrire le goût par pudeur et respect de vos estomacs délicats.

23h. L’heure du crime pour Hercule Poirot et l’heure de la frime pour nos hercules poivrots. Ambiance déchaînée et euphorique sur le dancefloor comme au lendemain de l’invasion de la Pologne; les discothèques sont à l’heure techno-hardcore-berlinoise.

00h00. Le doux bruit régulier de la basse poussée à son maximum d’infrasons rappelle aux plus nostalgiques les tirs réguliers du canon de .88 à Bastogne où les bruits des presses Krupp emboutissant les casques des futurs émissaires zélés d’un régime humaniste révolu.

1h00. Le teuton jubile donc, dans son élément quasi naturel, et sa voix grave prend alors son envol pour dépasser les percussions subsoniques et entonner un hymne guerrier très souvent issu du football, sport reconnu pour la qualité de ses chants de supporters. Il éructe donc dans la langue de Goethe, la bière – dont le compte se perd par manque de doigts à un mille-pattes – toujours à portée de gosier que nous renommerons puit-sans-fond plus plus de véracité.

2h00. Les portes des lieux de débauche ibériques se ferment sur nos teutons tartinés voire beurrés, la panse pleine d’or céréalier et les oreilles de sons industrieux mais électroniques.

8h00. Fidèles au poste, nos vaillants héros aux estomacs d’acier de la Ruhr sont déjà en rangs impeccables pour l’ouverture de la salle de petit déjeuner, attaquant la journée au champagne frelaté (#truestory) et au maquereau pimenté.

Joies simples d’un peuple simple et sans surprise qui a conquis avec indolence et fort PNB toute la Méditerranée et l’Amérique du Sud grâce à une forte émigration nazie.

Le Saint Empire Germanique vit caché mais il vit bien.

La situation économique actuelle toute considérée, je vous conseille donc fortement de pousser vos (futurs) enfants à choisir Allemand en Langue Vivante 2 et Brasserie en Langue Virevoltante 1.

Aufidersen.

Bref, tout ça ne nous ramènera pas Tokyo Hotel.

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